Après avoir réalisé une première partie de carrière dans le civil en tant qu’urgentiste hospitalier puis médecin sapeur-pompier professionnel, le médecin militaire Jean-Christophe s’est engagé en tant qu’« officier commissionné » pour un contrat de 4 ans au Service de santé des armées. Il soutient les troupes de montagne de l’armée de Terre et de la gendarmerie de haute-montagne à la 67ème antenne médicale, près d’Annecy (74).
Bonjour monsieur le médecin en chef Jean-Christophe. Après avoir réalisé une première partie de carrière dans le civil, pourquoi avoir choisi de rejoindre le Service de santé des armées ?
Je souhaitais diversifier mon activité et intégrer une équipe ayant une activité opérationnelle et sportive soutenue, mais également mettre en pratique mon diplôme de médecine du sport. Je cherchais à travailler dans une équipe faisant preuve de cohésion et dans une structure ayant des valeurs correspondant aux miennes.
Vous êtes médecin des forces, pourriez-vous nous décrire vos missions et le type de patientèle que vous prenez en charge au quotidien ?
Mes activités sont diverses et variées, aptitude médicale et consultations des militaires des troupes de montagne ainsi que des gendarmes du département ; soutien des activités de montagne des militaires du bataillon de chasseurs alpins ; formation des militaires au sauvetage au combat et du personnel paramédical aux spécificités des pathologies médicales que nous rencontrons au quotidien.
Nous avons des consultations programmées comme non programmées, notamment pour des urgences traumatiques, puisque les militaires en montagne ont des activités à risque. J’assure également le suivi des gendarmes avec des pathologies se rapprochant pour certains de celles de la population générale.
J’ai aussi une activité spécifique de médecine de prévention auprès des militaires des troupes de montagne mais aussi de la gendarmerie départementale, de l’escadron de gendarmerie mobile, du peloton de gendarmerie de haute-montagne, sans oublier des personnels civils rattachés au bataillon. Le soutien en montagne m’impose d’être en excellente condition physique et d’avoir une compétence en montagne qui doit être régulièrement évaluée.
Avec quelles autres professions travaillez-vous ?
Au quotidien, mon équipe médicale est constituée d’un médecin, d’un infirmier et d’un auxiliaire sanitaire, mais nous travaillons régulièrement avec les guides de montagne du bataillon de chasseurs alpins de l’armée de Terre ou du peloton de gendarmerie de haute montagne.
Avec quel type de matériel travaillez-vous ?
Le matériel utilisé est celui équipant classiquement toutes les antennes médicales (sac d’urgence, moniteur multi-paramètre, respirateur…). Toutefois, la spécificité du milieu montagnard dans lequel je suis amené à intervenir nous amène à utiliser du matériel avec un poids réduit et résistant aux intempéries. Nous sollicitons donc régulièrement les fabricants de matériel médical afin d’obtenir des appareils adaptés à notre pratique. Nous utilisons notamment du matériel technique de réanimation pour être totalement autonome lors d’intervention en milieu difficile.
Êtes-vous susceptible d’exercer en OPEX ?
Les conditions initiales de mon intégration (médecin commissionné) ne prévoyaient pas de départs en OPEX (opération extérieure). Toutefois, mon implication et mon intérêt dans l’activité opérationnelle m’ont fait demander des départs qui m’ont été accordés. J’ai donc eu le statut de médecin chef de l’antenne médicale héliportée à Naqoura au Liban et médecin aux Emirats Arabes Unis. Ce qui m’a marqué, c’est la grande qualité des échanges que j’ai pu avoir avec mes confrères étrangers lors de ma mission au Liban. En effet, j’ai pu côtoyer des équipes médicales du Népal, d’Indonésie et d’Inde avec une qualité relationnelle extraordinaire et des pris en charges médicales que je n’aurais pas imaginé aussi riches.
Quels types de formations avez-vous suivi pour en arriver à exercer au sein de cette antenne ?
J’ai plusieurs diplômes de médecine d’urgence : capacité de médecine d’urgence, capacité de médecine de catastrophe, diplôme interuniversitaire de médecine d’urgence en montagne.
Je me suis également formé à une pratique médicale appliquée l’environnement militaire : capacité de médecine du sport, MCSBG (mise en condition de survie du blessé de guerre), AMET (aéro médical évacuation team = prise en charge héliportée des urgences).
« Notre activité médicale est diversifiée et principalement axée sur la médecine et la traumatologie, qui m’intéressent tout particulièrement ».
Pourquoi aimez-vous exercer au Service de santé des armées ?
Notre activité médicale est diversifiée et principalement axée sur la médecine et la traumatologie, qui m’intéressent tout particulièrement. Il y a un lien fort entre pratique médicale et la pratique sportive.
J’apprécie particulièrement la journée hebdomadaire de formation, où notre pratique est optimisée (prise en charge des blessés de guerre, entraînement montagne…). De manière générale, je dirais que nous avons une équipe soudée au sein de l’antenne médicale d’Annecy. Chacun travaille dans son domaine dans l’intérêt du service et du patient.
Avez-vous une passion ou activité particulière en dehors de votre métier ?
Je vais régulièrement en montagne avec ma famille. Je joue de la guitare ou du piano dès que j’en ai le temps.

Après avoir exercé pendant 10 ans en tant que gérant d’établissement pédiatrique (mention polyhandicap de la Croix Rouge française), le pharmacien en chef Nicolas a décidé de s’engager au service de la Nation, comme pharmacien militaire au Service de santé des armées. Il occupe aujourd’hui le poste de responsable de la pharmacie à usage intérieur (PUI) de l’hôpital régional d’instruction des armées (HRIA) Legouest à Metz (57). Il décrit son quotidien.
Du civil au militaire
Bonjour monsieur le pharmacien en chef, pourquoi avez-vous basculé dans l’environnement militaire et choisi de rejoindre le Service de santé des armées ?
Après avoir exercé plus de dix années en pharmacie d’officine puis dans le domaine hospitalier, il me semblait important de poursuivre ma carrière professionnelle en conjuguant la recherche de la qualité de la prise en charge des patients et un respect des valeurs d’engagement au service de la Nation. J’ai consulté mes proches, pharmaciens, médecins, internes et infirmiers, ce sont eux qui m’ont parlé du Service de santé des armées (SSA) qu’ils connaissaient. Et ça semblait correspondre à mes attentes !
Quelles sont vos missions au quotidien ?
Je suis en charge d’assurer l’approvisionnement et la prise en charge médicamenteuse des patients de l’hôpital. Concrètement, je dirige une équipe pluridisciplinaire (pharmaciens, préparateurs et préparatrices en pharmacie hospitalière, magasiniers, secrétaires) constituée de civils et de militaires. Autour de la pharmacie, j’ai pour interlocuteurs les médecins, les infirmiers et infirmières afin de les accompagner au mieux dans la prescription et l’administration des médicaments et des dispositifs médicaux.
En fonction des besoins, je peux mettre à disposition mes connaissances de pharmacien dans le cadre de missions comme lors d’opérations extérieures ou de soutien aux populations civiles (par exemple la crise Covid-19), au sein d’une Unité de dispensation des produits de Santé (UDPS).
Quel type de patientèle prenez vous en charge au sein de l’hôpital régional d’instruction des armées (HRIA) Legouest ?
Je suis affecté dans un établissement de santé dont la priorité est la prise en charge des patients militaires, mais pas seulement. Désormais, nous accueillons aussi des patients civils en collaboration avec les établissements hospitaliers de notre bassin de population car nous sommes en capacité de proposer des services médicaux très demandés. Par exemple, nous hébergeons plusieurs services d’urgences dont un en soins dentaires, généralement très recherché, de consultations pour de la médecine de voyages, des soins de suite et de réadaptation pour nos blessés, d’un service de psychiatrie…
Un environnement de travail atypique
Vous êtes responsable de la pharmacie à usage intérieur (PUI) de l’établissement. En quoi consiste plus précisément l’activité de cette pharmacie ?
Nous sommes en charge de fournir les médicaments et dispositifs médicaux stériles pour les patients pris en charge aussi bien aux urgences que dans les services d’hospitalisation. Dans un contexte de rupture de stock de médicaments, ce n’est pas une mince affaire. C’est à nous de gérer au mieux nos stocks, d’anticiper nos besoins et d’être force de proposition auprès des prescripteurs pour conseiller des alternatives quand nous sommes en difficulté. La période de la crise Covid-19 aura été pour nous une grande leçon sur ces questions : la population mondiale est touchée en même temps par une même pathologie. Nous avons donc des besoins en médicaments identiques, partout. Les ruptures d’approvisionnement sont alors inéluctables et c’est à nous de nous creuser les méninges. Un vrai challenge au service des patients !
Par ailleurs, en tant qu’experts du médicament, nous analysons les prescriptions afin de s’assurer que les médicaments sont adaptés à la physiologie et à la pathologie du patient. Nous intervenons quand cela est nécessaire pour suggérer des adaptations. Enfin, nous développons des activités de pharmacie clinique pour être toujours plus proche du traitement des patients, en toute sécurité.
Avec quel type de matériel travaillez-vous pour réaliser toutes ces missions ?
L’informatique est une des bases de notre activité puisque les prescriptions sont informatisées. C’est le support de nos analyses pharmaceutiques. Par ailleurs, les PUI disposent d’un préparatoire pour préparer certains médicaments (pommades, collyres sous hotte…), d’une salle blanche (zone à atmosphère contrôlée) pour préparer les médicaments de chimiothérapies anticancéreuses ; ou encore des réfrigérateurs haute capacité reliés à des systèmes de surveillance et d’alerte des températures pour s’assurer de la bonne conservation de certains médicaments (vaccins, insulines, biothérapies…), ou bien des dispositifs de stockage automatisés pour gagner de la place pour le stockage des dispositifs médicaux stériles. Enfin, des chariots équipés de piluliers sont également nécessaires à la sécurisation de la prise en charge médicamenteuse des patients.
Avec quelles autres spécialités êtes-vous amenés à exercer au quotidien ?
La PUI est un petit monde en soi, où différentes activités se côtoient et se complètent en bonne intelligence. Chacun y a son rôle. Le pharmacien analyse les prescriptions médicamenteuses et passe les commandes auprès des fournisseurs, les préparateurs en pharmacie hospitalières sont en charge de la préparation des piluliers à délivrance journalière individuelle nominative permettant aux services de soins d’être sûrs de ce qui est dispensé pour chaque patient. Ils veillent au réapprovisionnement des services de soins. Les magasiniers réceptionnent les commandes, signalent les retards de livraison, les litiges et assurent le rangement dans les zones de stockage. Les secrétaires assurent la transmission des commandes, les demandes de devis, le suivi des marchés négociés et le traitement des factures.
Hors de la PUI, les médecins, les infirmiers et infirmières, les aides-soignants sont nos principaux interlocuteurs. Comme j’ai coutume de dire : le pharmacien et son équipe passent partout dans l’hôpital, alors tout le monde les identifie.
En tant que pharmacien, êtes-vous susceptible d’exercer en opérations extérieures (OPEX) ?
Bien sûr, les unités de dispensation des produits de Santé (UDPS) sont déployées en OPEX et ceci sous la responsabilité d’un pharmacien. C’est un élément-clé des dispositifs projetés car pour soutenir des services de médecine, de chirurgie, de radiologie (scanner, IRM…), il faut des médicaments et des dispositifs médicaux. A distance, le pharmacien doit s’organiser pour ne pas manquer de stock et d’éviter de perdre trop de matériel et de médicaments périmées par exemple… Je me vois mal répondre à un chirurgien, « pour les lames de bistouri, il faudra attendre 15 jours. J’ai oublié de les commander ».
Suivez-vous des formations pour rester opérationnel tout au long de votre carrière et vers quelles fonctions pourriez-vous être amené à évoluer ?
J’ai suivi une formation au risque NRBC (nucléaire, radiologique, biologique, chimique) et suivi un diplôme universitaire de prévention des infections associées aux soins. L’École du Val-de-Grâce propose de nombreuses formations dans diverses disciplines, pour étoffer et actualiser ses connaissances.
Pour l’instant, je ne sais pas encore comment j’évoluerai dans l’institution, mais j’observe que le SSA offre de nombreuses possibilités d’évolutions de carrière.
La cohésion, un état d’esprit quotidien
Comment se manifestent les valeurs de cohésion et d’engagement dans votre métier ?
La cohésion est une réalité du quotidien. Le fait de partager un certain nombre de valeurs rapproche naturellement. Les OPEX renforcent ce sentiment. Des temps forts comme la cérémonie des couleurs nous rappellent ces valeurs. C’est stimulant !
De manière générale, pourquoi appréciez-vous servir au Service de santé des armées ?
C’est une vision centrée sur le soutien. Le maximum est fait pour le patient, en priorité pour le militaire car c’est notre mission principale mais aussi pour la population civile. L’implication est réelle. Le fait d’avoir une hiérarchie organisée peut parfois surprendre au départ mais finalement c’est un réel avantage : quand une décision est prise, elle est bénéfique pour tous. Après des années d’expérience professionnelle, je constate que c’est un moyen efficace de lutter contre les pertes de temps inutiles.
Quel est votre moment préféré de la semaine ?
Même si j’aime mon métier, évidemment la fin de semaine est celle que j’apprécie le plus. L’ambiance se détend, le sentiment d’avoir accompli un certain nombre de choses est une source de satisfaction. En journée, les repas pris ensemble sont un plus pour échanger sur d’autres sujets que notre travail, cela facilite la cohésion. Sinon en dehors de mon métier, j’aime restaurer de vieilles voitures et jardiner.